Daniel Pennac

Biographie


Fils de militaire, Daniel Pennacchioni a connu une enfance nomade, la famille posant ses valises tantôt en Afrique (Djibouti, Éthiopie, Algérie, Afrique équatoriale), tantôt en Asie du sud-est (Indochine) tantôt en France. Si ses premiers contacts avec l’école ont pu être délicats (il prétend avoir mis un an à assimiler la logique et la complexité du « A »), il ne lui tourne pas pour autant le dos : devenu maître ès lettres, il passe derrière le bureau pour enseigner à Soissons, Nice puis Paris – non sans avoir fait quelques détours, endossant tantôt l’habit de chauffeur de taxi, tantôt celui d’illustrateur.

Un changement de patronyme accompagne la parution de son premier ouvrage : avec son pamphlet Le Service militaire au service de qui (1977), Daniel Pennac entre en écriture. Après un séjour de deux ans au Brésil qui lui inspire un roman, Le Dictateur et le hamac (2003), il regagne son quartier de Belleville à Paris et retrouve sa classe. Il écrit pour les enfants avant de lancer, en 1985, la fameuse saga Malaussène. Dix ans plus tard, en 1995, il quitte l’enseignement pour se consacrer pleinement à l’écriture.

Daniel Pennac, qui a défendu les « droits imprescriptibles du lecteur » dans son essai Comme un roman (1992), s’adonne au plaisir de lire à voix haute : ainsi, en 2012, il a donné une lecture de son roman, Journal d’un corps¸ aux Bouffes du nord.




Coups de cœur présentés lors de la rencontre avec Daniel Pennac


Rencontre avec Daniel Pennac

Le vendredi 12 décembre 2014


Daniel Pennac, L’Amie prodigieuse, Elena Ferrante, trad. de Elsa Damien Gallimard, coll. « Du monde entier », Formidable voyage dans Naples et dans l'Italie du boom économique, L'amie prodigieuse trace le portrait de deux héroïnes inoubliables, qu'Elena Ferrante traque avec passion et tendresse jusqu'au plus profond de leur âme.

Daniel Pennac, La Porte, Magda Viviane Hamy, trad. de Chantal Philippe, Maggda Szabo ébauche les portraits croisés d'une intellectuelle sous influence d'une femme étrange et rare et à la fin très attanchante. Chef d’œuvre de la littérature hongroise.


Daniel Pennac, D’acier, Silvia Avallone, Viviane Hamy, il y a la Méditerranée, la lumière, l'île d'Elbe au loin. Mais ce n'est pas un lieu de vacances. C'est une terre sur laquelle ont poussé brutalement les usines et les barres de béton. Depuis les balcons uniformes, on a vue sur la mer, sur les jeux des enfants qui ont fait de la plage leur cour de récréation. La plage, une scène idéale pour la jeunesse de Piombino. Entre drague et petites combines, les garçons se rêvent en chefs de bandes, les filles en starlettes de la télévision. De quoi oublier les conditions de travail à l'aciérie, les mères accablées, les pères démissionnaires... Anna et Francesca, bientôt quatorze ans, sont les souveraines de ce royaume cabossé. Ensemble, elles jouent de leur éclatante beauté, rêvent d'évasion et parient sur une amitié inconditionnelle pour s'emparer de l'avenir.

Daniel Pennac, La Solitude des nombres pairs, Paolo Giordano, Points Seuil, Elle aime la photo, il est passionné par les mathématiques. Elle se sent exclue du monde, il refuse d’en faire partie. Chacun se reconnaît dans la solitude de l’autre. Ils se croisent, se rapprochent puis s’éloignent, avant de se frôler à nouveau. Leurs camarades de lycée sont les premiers à voir ce qu’Alice et Mattia ne comprendront que bien des années plus tard : le lien qui les unit est indestructible.


Daniel Pennac, Pas pleurer, Lidye Salvayre, Seuil, Deux voix entrelacées. Celle, révoltée, de Georges Bernanos, témoin direct de la guerre civile espagnole, qui dénonce la terreur exercée par les nationalistes avec la bénédiction de l'Eglise catholique contre les « mauvais pauvres » . Son pamphlet, Les Grands cimetières sous la lune, fera bientôt scandale. Celle, roborative, de Montse, mère de la narratrice et " mauvaise pauvre ", qui, soixante-dix ans après les événements, a tout gommé de sa mémoire, hormis les jours radieux de l'insurrection libertaire par laquelle s'ouvrit la guerre de 36 dans certaines régions d'Espagne, des jours que l'adolescente qu'elle était vécut dans la candeur et l'allégresse dans son village de Haute Catalogne. Deux paroles, deux visions qui résonnent étrangement avec notre présent, comme enchantées par l'art romanesque de Lydie Salvayre, entre violence et légèreté, entre brutalité et finesse, portées par une prose tantôt impeccable, tantôt joyeusement malmenée.


Isabelle, L’aventure de la calligraphie, Geste, trait, résonance. Des premiers artistes de la préhistoire aux maîtres, Colette Poggi, Bayard, Depuis les plus anciennes civilisations, les êtres humains ont éprouvé le besoin de tracer des lignes, reflets de leur univers. Des silhouettes de bisons peintes sur les parois des grottes préhistoriques, des peintures aborigènes d'Australie jusqu'aux chorégraphies contemporaines de Carolyn Carlson, toutes les cultures de l'humanité ont fait preuve d'une extraordinaire créativité dans le domaine de l'art du trait. L'originalité de ce livre est d'offrir des passerelles entre héritage du passé et artistes calligraphes contemporains, entre Orient et Occident. Il propose une réflexion sur ce qui transparaît des sociétés à travers leurs calligraphies et donne à voir des créations inédites réalisées par les plus grands calligraphes d'aujourd'hui.


Isabelle, Musique au château du siècle Un portrait de Jean-Sébastien Bach, John Eliot Gardiner, Flammarion, Jean-Sébastien Bach est l'un des compositeurs les plus mystérieux de l'histoire de la musique. Comment une oeuvre aussi sublime a-t-elle pu jaillir d'un homme si ordinaire et si opaque ? John Eliot Gardiner a grandi sous le regard d'un des deux portraits authentiques de Bach, conservé dans la maison de ses parents où il avait été caché pendant la Seconde Guerre mondiale. C'est depuis l'enfance qu'il étudie et joue Bach, dont il est aujourd'hui l'un des plus grands interprètes. Cet ouvrage exceptionnel est le fruit d'une vie passée à parfaire sa science et sa pratique de la musique de Bach. Nourri d'archives et d'analyses pénétrantes, il nous fait rencontrer e l'homme en sa création" : nous ressentons ce que pouvait être l'acte de faire de la musique, nous habitons les mêmes expériences, les mêmes sensations que lui. John Eliot Gardiner.


Isabelle, L’Arabe du futur, Riad Sattouf, Allary, Né d’un père syrien et d’une mère bretonne, Riad Sattouf grandit d’abord à Tripoli, en Libye, où son père vient d’être nommé professeur. Issu d’un milieu pauvre, féru de politique et obsédé par le panarabisme, Abdel-Razak Sattouf élève son fils Riad dans le culte des grands dictateurs arabes, symboles de modernité et de puissance virile. En 1984, la famille déménage en Syrie et rejoint le berceau des Sattouf, un petit village près de Homs. Malmené par ses cousins (il est blond, cela n’aide pas…), le jeune Riad découvre la rudesse de la vie paysanne traditionnelle. Son père, lui, n’a qu’une idée en tête : que son fils Riad aille à l’école syrienne et devienne un Arabe moderne et éduqué, un Arabe du futur.

Daniel Pennac, Réparer les vivants, Maylis de Kerangal, Verticales, « Le coeur de Simon migrait dans un autre endroit du pays, ses reins, son foie et ses poumons gagnaient d'autres provinces, ils filaient vers d'autres corps ». Réparer les vivants est le roman d'une transplantation cardiaque. Telle une chanson de gestes, il tisse les présences et les espaces, les voix et les actes qui vont se relayer en vingt-quatre heures exactement. Roman de tension et de patience, d'accélérations paniques et de pauses méditatives, il trace une aventure métaphysique, à la fois collective et intime, où le coeur, au-delà de sa fonction organique, demeure le siège des affects et le symbole de l'amour.


Stéphanie, Tziganes, Yan Yoors, Phébus, Une ville des Flandres dans l'entre-deux-guerres. Un gamin de douze ans fugue pour rejoindre une compagnie de Tsiganes qui passaient par là : une famille de Rom Lovara, ces dresseurs de chevaux qui sont considérés comme l'aristocratie des Fils du Vent. 

Les parents du gamin le font rechercher, finiront par le retrouver. Il leur explique qu'il ne veut plus aller à l'école, qu'il veut suivre ses amis les Rom sur la route… Et, chose incroyable, les parents le laissent repartir. 

Devenu un Rom parmi les Rom, Yoors en racontant son aventure livre ce qu'on ne trouve dans aucun ouvrage : la vérité d'une culture dont tout Tsigane qui se respecte cache jalousement les secrets. Car ces gens affamés de liberté se font un devoir moral de mentir à tous ceux qui les interrogent… 

Dès lors s'explique-t-on que ce livre-culte, à peu près seul de son espèce, trouve grâce aux yeux des Tsiganes eux-mêmes. Et soit considérés par quelques autres comme un bréviaire de l'insoumission.


Béatrice, Remonter la Marne, Jean-Paul Kauffmann, Le Livre de poche, Remonter à pied la Marne, depuis sa confluence avec la Seine jusqu'à la source, a été pour Jean-Paul Kauffmann une odyssée à travers les paysages d’une France inconnue. L'aventureuse histoire de notre pays lui est apparue à la lumière du présent. Il y a découvert la France des « conjurateurs », ces indociles qui résistent à la maussaderie et chassent les esprits maléfiques d'aujourd'hui. Remonter la Marne, ce n'est pas revenir en arrière et pleurer le passé, mais plutôt se perdre pour mieux renaître. La marche a permis d’entretenir ce rapport profond au temps, au silence, aux rencontres.


Jean-Michel, Tout est silence, Manuel Rivas, Gallimard, coll. « Du monde entier », Au nord de l'Espagne, sur la côte galicienne, la contrebande est pratique courante chez les pêcheurs depuis le Moyen Âge. Mais quand le petit village de Noitía se transforme en l'un des centres les plus importants du trafic mondial de drogue, on change brutalement d'échelle, de langage et de coutumes. Désormais l'argent, l'amour et la mort n'ont plus le même sens ni les mêmes dimensions. Manuel Rivas nous raconte ici ce bouleversement qui marque l'écart entre deux générations. Adolescents, Fins, Leda et Brinco comprennent que leur village est régi par la seule loi que fixe Monsieur Mariscal mais que les temps sont en train de changer. Alors que Leda et Brinco rejoignent son bord et deviennent de riches trafiquants, Fins, à l'opposé, entre dans la police judiciaire et n'aura de cesse de les traquer, comme s'il courait secrètement derrière son ombre la plus obscure et sur les traces de son bonheur perdu. Dès lors, leurs trois destins seront définitivement liés à l'évolution de la Galice dans ce monde global : en trente ans, ce qui n'était qu'une bande de contrebandiers se transformera en une mafia implacable, les vieilles barques deviendront des bateaux ultrarapides, le tabac de la cocaïne et la petite délinquance se rapprochera nettement du grand crime mondialisé. Les rires, les cris, les conversations s'arrêtent un jour sur cette pointe extrême de l'Europe, car, quant à parler on joue sa vie, tout est silence...


Nina, Mémoires d’Hadrien, Marguerite Yourcenar, Gallimard, coll. « Folio », « J'ai formé le projet de te raconter ma vie. » Sur son lit de mort, l'empereur romain Hadrien (117-138) adresse une lettre au jeune Marc Aurèle dans laquelle il commence par donner "audience à ses souvenirs". Très vite, le vagabondage d'esprit se structure, se met à suivre une chronologie, ainsi qu'une rigueur de pensée propre au grand personnage. Derrière l'esthète cultivé et fin stratège qu'était Hadrien, Marguerite Yourcenar aborde les thèmes qui lui sont chers : la mort, la dualité déroutante du corps et de l'esprit, le sacré, l'amour, l'art et le temps. À l'image de ce dernier, ce « grand sculpteur », elle taille, façonne, affine avec volupté chacun des traits intérieurs du grand homme à qui elle fait dire : « Je compte sur cet examen des faits pour me définir, me juger peut-être ou tout au moins pour me mieux connaître avant de mourir. »


Nina, Epicure en Corrèze, Marcel Conche, Stock, A 92 ans, ce professeur émérite à la Sorbonne raconte son quotidien avec "Epicure en Corrèze". Une leçon de savoir-vivre...

Il vit sans Dieu, mais croit aux dieux païens. Il dialogue avec les Grecs et reçoit tous les jours la visite d'Epicure, qui est le meilleur conseiller pour la vieillesse (pour la jeunesse, il préconise plutôt les stoïciens). Il répète que le seul scandale universel est la souffrance des enfants martyrisés. Il mange peu et sans sel. Il travaille toujours avec le même plaisir. Après quoi, il se rend au cimetière qui jouxte l'église - «je m'y plais beaucoup» -, où son père, sa mère, sa femme sont enterrés sous des croix chrétiennes. Mais sur sa tombe, qui est prête, «il n'y aura rien». Rien, sauf les livres de lui, ses traités de bien-vivre, qu'on y déposera, avec gratitude.


Daniel Pennac, Mars, Fritz Zorn, Gallimard, coll. Folio », Sous le pseudonyme de Fritz Zorn se cache un jeune homme pressé. Jeune - il n'a que 32 ans - et pressé d'écrire car il se sait condamné par un cancer qui ne lui laissera aucune chance. Pour qui a vécu, la seule pensée d'une mort imminente fait jaillir le squelette branlant d'une angoisse incompressible et dévorante. Fritz Zorn est à peine révolté, il n'a jamais vécu. Produit d'une éducation pour laquelle l'impassibilité devant les réalités concrètes (donc vulgaires) du monde tient lieu d'obligation morale, Zorn a toujours été un « hors la vie ». Propre, sage et faisant honneur à sa famille, fleuron de la grande bourgeoisie zurichoise, il n'a jamais fait de vagues, s'est conformé, a emprunté docilement la voie qu'on lui avait tracé, a écouté la voix qui l'incitait à se méfier du monde extérieur et de ses vices. Pour cet homme qui observe avec simplicité qu'on l'a « éduqué à mort », le cancer n'est que l'issue naturelle d'un étouffement systématique de sa dynamique individuelle.


Marine, Winnie ille Pu, Alan Alexander Milne, Les Belles Lettres, Alexander Lenard, voyant que ses élèves rechignaient un peu à étudier le latin, entreprit pour eux de traduire Winnie the Pooh d'Alan Alexander Milne. Publié de manière confidentielle en 1958, Winnie ille Pu connut pourtant un succès phénoménal au point qu il reste le seul ouvrage en latin à être entré dans la liste des best-sellers du New-York Times ! Loin des clichés des dessins animés, on découvre dans ces pages la fantaisie et la poésie d’un trésor de la littérature pour enfants et dont on propose ici la première édition française intégrale. Christopher Robin et son fameux ourson Winnie, Ticochon, Hibou, Lapin, Hi-Han, Kangou et Rou, et tous les autres animaux vivent des aventures incroyables et s’expriment dans un latin drôlement impeccable que les débutants ou les savants, les petits ou les grands ne manqueront pas de savourer.


Marine, La Gana, Fred Deux, Le temps qu’il fait, « L'auteur nous a subjugués, envoûtés, et, au vrai, je le dis sans goût pour les paradoxes faciles, c'est peu de huit cents pages pour parvenir à un tel résultat. D'autres n'y seraient pas parvenus en trois mille, et beaucoup par leur oeuvre entier. Fred Deux a découvert une planète que nous pensions connaître : le monde du sexe et de l'organique, ou le monde réduit à ses soubassements sexuels et organiques, alors que nous en ignorions la mystérieuse topographie. Pour dresser celle-ci il fallait sans doute un géographe, il fallait surtout un poète pour conduire le géographe. L'auteur s'est laissé mener par l'enfant qu'il a sans doute été et c'est pourquoi La Gana baigne tout entière dans cette poésie cruelle et violente qui est celle de l'enfance aux prises avec des mystères trop grands pour elle. Cette poésie transforme le sordide en objet d'art. Elle permet de substituer au dégoût ou à l'apitoiement facile la révolte. Elle entraîne un ouvrage qui aurait pu n'être que remarquable, et en marge, dans les grandes eaux d'une littérature qui aide à vivre » Maurice Nadeau